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« Transmania »… « Un livre haineux » et pourtant surmédiatisé

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À l'occasion d'un rassemblement contre la transphobie à Paris, ce dimanche, plusieurs milliers de personnes se sont retrouvées place de la République pour lutter contre « l'offensive transphobe ». Parmi les noms qui hérissent les poils de la communauté LGBT+, ceux de Marguerite Stern et Dora Moutot. Depuis mi-avril, les deux autrices et militantes proches des idées de l'extrême droite poursuivent leur tournée des grands plateaux pour promouvoir leur livre Transmania, aux éditions Magnus.

En France, elles sont considérées comme des Terf, des « Trans-exclusionary radical feminist ». Comprenez ici « Féministe radicale excluant les personnes trans ». Les deux militantes se qualifient davantage de « femellistes », un mouvement conservateur qui défend la femme comme « femelle humaine ». Depuis sa sortie, Transmania attise la colère. Dora Moutot a expliqué sur ses réseaux sociaux avoir été menacée de mort à plusieurs reprises. Des pancartes « Dora Moutot au fond du Rhin » ont été brandies à Strasbourg et un tag « Une Terf, une balle » est apparu à Paris. Sur son Twitter, l'autrice JK Rowling - également accusée de transphobie - lui a exprimé son « affection » et son « soutien ».

« Un livre haineux », selon une tribune

Pour résumer le livre, nous citerons sa quatrième de couverture : « L'idéologie transgenre est en train de s'infiltrer dans toutes les sphères de la société. Elle se présente comme un simple mouvement pour les droits d'une minorité opprimée, pourtant, derrière les paillettes, se trouve un projet politique néfaste qui s'apprête à bouleverser notre rapport au réel ».

Le livre a été qualifié de « haineux » par une tribune signée par 800 personnalités publiques et collectifs dans l'hebdomadaire Politis. « Les réactionnaires cherchent à installer dans le débat public l'idée que les personnes trans sont un danger : pour les enfants, pour la société et pour elles-mêmes », accusent les signataires.

Parmi eux, l'association SOS Homophobie a même décidé de porter plainte le 20 avril dernier contre Dora Moutot et Marguerite Stern. « La transphobie tue. La liberté d'expression ne saurait justifier la haine contre les personnes trans », a déclaré l'association sur ses réseaux sociaux.

Le discours transphobe « n'est pas une opinion »

Dans Paris, le groupe JCDecaux a également annoncé retirer les publicités de promotion du livre à la demande d'Emmanuel Grégoire, premier adjoint à la Mairie de Paris. « La transphobie est un délit. La haine de l'autre n'a pas sa place dans notre ville », a dénoncé l'élu sur ses réseaux sociaux. L'opérateur, lui, a expliqué que le visuel était contraire à leur « charte déontologique », s'excusant des affiches ayant pu « heurter ». Idem à Lyon à la demande du maire Grégory Doucet.

Le sénateur Ian Brossat a quant à lui demander l'annulation d'une conférence en présence des autrices à l'université Panthéon Assas. « Les établissements publics d'enseignement supérieur ne doivent pas servir de plateformes pour des discours haineux qui déforment la réalité et stigmatisent les personnes trans. Loin d'encourager un dialogue constructif et instructif, cet événement risque de perpétuer un climat d'intolérance et de violence », a défendu l'élu.

« Ce n'est pas une opinion politique la transphobie, comme l'homophobie. Ces propos sont condamnables et n'ont pas leur place dans les universités », défendait à son tour Léon Deffontaines - tête de liste du Parti communiste pour les européennes - sur le plateau de la matinale de TF1, vendredi.

Les autrices crient à la censure

Sur les plateaux, les autrices évoquent « une censure », selon Dora Moutot basée « sur des suppositions plutôt que sur une analyse du contenu » et un « obscurantisme qui cherche à museler toute pensée critique ». Auprès du site Actualitte, la maison d'édition Magnus a également défendu l'ouvrage qui ne contiendrait, selon eux, « aucun propos répréhensible ». Et d'ajouter : « Quand on ne peut pas attaquer le message, on attaque le messager ».

Le messager, lui aussi, tire. Les deux femmes sont habituées des coups de poing médiatiques pour défendre leur idéologie radicale. En octobre 2022, sur le plateau de Quelle époque !, Dora Moutot avait tenu des propos transphobes contre la première maire transgenre de France, Marie Cau, en estimant que les femmes trans étaient dangereuses pour leurs codétenues, car elles pouvaient les violer. Des faits extrapolés et sortis de leur contexte, que 20 Minutes avait à l'époque vérifiés. Ces discours sont pourtant bien reçus dans les médias qui continuent à les recevoir sans jamais les contredire.

D'après une étude publiée en février 2023 par l'Association des journalistes LGBTI, le traitement des transidentités est souvent minoritaire dans les médias et quand il est traité, il reste souvent incompris. « Les personnes concernées restent largement invisibilisées, et ce au profit de personnes tenant, à l'opposé, des discours transphobes. Certains médias s'en sont d'ailleurs fait une spécialité, en mettant en avant les tribunes et positions de personnalités telles que Dora Moutot, Marguerite Stern, ou des membres de l'Observatoire de la petite sirène. À ce sujet, l'AJL tient à rappeler la responsabilité des médias dans la diffusion des positions transphobes, via des publications souvent non contextualisées et non sourcées ».

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