En Afghanistan, six morts dans une attaque contre un groupe de touristes sur le bazar de Bamiyan

Les victimes sont trois Espagnols, deux civils afghans qui les accompagnaient et un taliban. Cette ville du centre du pays, site des bouddhas géants détruits par les talibans en 2001, est la première destination touristique du pays.

Une attaque contre des touristes, vendredi 17 mai à Bamiyan, en Afghanistan, a fait six morts, a annoncé samedi le gouvernement taliban. Les corps de trois Espagnols et de trois ressortissants afghans, ainsi que de nombreux blessés, ont été transportés à Kaboul.

Le groupe Etat islamique (EI) a revendiqué dimanche dans la soirée l'attaque. Dans un communiqué diffusé sur ses chaînes Telegram, le groupe jihadiste affirme que « des combattants ont tiré à la mitrailleuse sur des touristes chrétiens et leurs compagnons chiites » vendredi à Bamiyan, ville montagneuse du centre de l'Afghanistan.

Les victimes ont été la cible de coups de feu, vendredi, en fin de journée alors qu'elles se trouvaient dans le bazar de cette ville du centre du pays, a déclaré à l'Agence France-Presse (AFP), le porte-parole du ministère afghan de l'intérieur, Abdul Mateen Qani.

Situé à quelque 180 kilomètres de la capitale afghane, Bamiyan, le site des bouddhas géants dynamités par les talibans en 2001, avec ses lacs turquoise et ses montagnes, est la première destination touristique d'Afghanistan.

Cette attaque meurtrière semble être la première contre des touristes étrangers en Afghanistan depuis le retour au pouvoir des talibans, en août 2021. Madrid a confirmé, samedi, la mort de ses trois ressortissants, qui faisaient partie d'un « groupe de six Espagnols affectés par l'attaque ».

Le porte-parole du gouvernement de Kaboul a, lui, fait état de « trois citoyens afghans tués dans l'attaque », dont un taliban et deux civils. Selon des responsables locaux, les civils travaillaient pour une agence de tourisme. Le taliban, qui était chargé de la sécurité, a ouvert le feu quand les tirs ont éclaté.

L'assaillant « était là pour les étrangers »

Anne-France Brill, qui participait à un voyage organisé, décrit les secondes de terreur quand un homme armé s'est approché, en marchant, des véhicules du groupe et a ouvert le feu. « Il y avait du sang partout », a-t-elle raconté après avoir été évacuée au départ de Kaboul vers Dubaï, samedi. « Une chose est certaine, [l'assaillant] était là pour les étrangers », assure-t-elle,

Les autorités talibanes ont précisé que les morts et les blessés avaient été transportés à Kaboul dans la nuit de vendredi à samedi, par la route. Les conditions météorologiques ne permettaient pas de transport aérien, a précisé à l'AFP une source diplomatique.

Selon l'ONG italienne Emergency, présente à l'hôpital de Kaboul, les personnes admises dans l'établissement étaient originaires d'Espagne, de Lituanie, de Norvège, d'Australie et d'Afghanistan. « Les blessés sont arrivés à 3 heures ce matin [23 h 30 vendredi, à Paris], soit environ dix heures après l'incident », a déclaré le directeur d'Emergency en Afghanistan, Dejan Panic, dans un communiqué. « Le citoyen afghan est celui dont l'état est le plus critique, mais tous les patients sont désormais stabilisés », a-t-il ajouté.

Une Espagnole grièvement blessée a été opérée à Kaboul, selon le ministère des affaires étrangères espagnol. L'Espagne, comme d'autres pays occidentaux, avait évacué son ambassade en 2021, lors de la prise du pouvoir par les talibans. Les autorités espagnoles travaillent en coordination avec la délégation de l'Union européenne (UE) à Kaboul.

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L'UE a condamné l'attaque « dans les termes les plus forts », et la mission de l'ONU en Afghanistan s'est dite « profondément choquée et consternée par cette attaque terroriste meurtrière », ajoutant qu'elle aidait à gérer la situation.

« Le modus operandi montre qu'il s'agit d'un attentat »

« Sept suspects ont été arrêtés, dont un a été blessé », a annoncé le porte-parole du ministère afghan de l'intérieur, Abdul Mateen Qani. Le ministre des affaires étrangères espagnol, Jose Manuel Albares, n'a pas exclu la présence de plusieurs attaquants. « Il est possible que d'autres personnes aient tiré », a-t-il déclaré sur la chaîne TVE, estimant que « le modus operandi montr[ait] qu'il s'agi[ssai]t d'un attentat ».

La province de Bamiyan est en majorité habitée par des membres de la communauté hazara, des chiites. Ceux-ci sont régulièrement visés par des attentats meurtriers de l'organisation Etat islamique (EI), sunnite, généralement menés avec des engins explosifs contre des véhicules.

Après plus de quarante ans de conflits meurtriers, la sécurité est globalement revenue en Afghanistan depuis 2021, mais l'EI continue de perpétrer des attentats.

« L'émirat islamique condamne fermement ce crime, exprime ses profonds regrets aux familles des victimes, et garantit que tous les criminels seront retrouvés et punis », a déclaré, vendredi, le porte-parole du ministère de l'intérieur afghan.

Cette attaque contre des touristes survient alors que l'Afghanistan, l'un des pays les plus pauvres du monde, tente de s'ouvrir au tourisme. En dépit du manque d'infrastructures et de la rareté des sites culturels à la suite des destructions et les pillages des guerres, un tourisme étranger commence à émerger dans ce pays à la population extrêmement accueillante et aux paysages grandioses.

Le nombre de visiteurs étrangers en Afghanistan a ainsi progressé de 120 %, à près de 5 200 en 2023, sur un an, selon des chiffres officiels. Mais les autorités des pays occidentaux déconseillent de s'y rendre, en raison justement des risques d'attaques ou d'enlèvements.

Le Monde avec AFP

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